L’asperge

asperges-fond-blancUn mets de choix

Autour de Mazan ou de Mormoiron, le paysage offre une version un peu aplanie du pays du Ventoux, un quadrillage typique où alternent au printemps les rangées de vignes et des buttes de terre étirées en longs rubans rectilignes. Ces champs d’asperge profitent là d’une terre sablonneuse à souhait. Cette culture est surtout complémentaire au raisin; et les parcelles dédiées obéissent à un cycle et un « timing » spécifiques. Jadis, profitant d’espaces suffisants et d’un calendrier particulier (la récolte étant très précoce), chaque ferme de ce piémont des « ocres » du Ventoux consacrait une part de son activité à cette plante vivace. Aujourd’hui, elle concerne encore, ici et là, une petite douzaine de producteurs.
Mais y-a-t-il asperge et asperge ? Sur les étals du marché villageois, le consommateur gourmet retrouve en effet trois offres : l’asperge blanche, violette ou verte. La réponse n’est pas histoire de variétés même si l’on en compte quelques dizaines quasi similaires, dont « l’Argenteuil ». La couleur du produit dépend en fait seulement de la technique de récolte. Une tige verte et une tête bien fermée – aspect particulièrement apprécié en Provence -, indique simplement qu’on a laissé l’asperge pousser hors de terre, perçant en plein champ et se colorant donc au soleil, sous l’effet de la photosynthèse. Une pointe de teinte légèrement violette signale que l’on a volontairement attendu que le bourgeon « pointe juste son nez » à la lumière avant de ramasser. Quant à l’asperge blanche, prédominante en production à grande échelle, elle est cueillie avant que la plante ne voie le jour. C’est celle-là qui nécessite donc la formation d’une petite butte de terre (elle-même protégée par une bâche plastique) pour la recouvrir entièrement à partir de janvier et contrôler une pousse très rapide : on parle de « forçage », en usage depuis la fin du XIXème siècle en Provence.

Pas de mécanisation possible de la récolte

Pour l’asperge blanche, pas question donc de louper le bon moment de récolter, à partir de la mi-mars. Une tâche qui s’avère plutôt physique. Le paysan dégage une à une les tiges, alias les turions, avant de les couper à l’aide d’une gouge particulière. Pas de mécanisation possible de la récolte. Et le conditionnement à suivre implique également bien du travail : il faut trier, calibrer puis botter ou empaqueter…
Pas facile, ensuite, de présenter les calibrages d’asperge sans se heurter à une idée reçue. Il faut donc convaincre que le choix d’une asperge à grosse tige est plus judicieux car issue d’une plantation plus jeune et généreuse ! A l’inverse du haricot vert, la tige mince ne suppose pas en effet un légume plus tendre et moins filandreux. Le cycle de vie de l’asperge explique tout cela. Il faut d’abord semer une parcelle et attendre deux ou trois ans, puis récolter chaque année… pendant une petite décennie au maximum. Car si l’aspergeraie se plait sur une terre à vigne et participe à l’assolement des sols, elle finit malgré tout par produire des plants de moins en moins vigoureux. Puis ses « griffes » – des racines type « rhizomes » – tendent à développer un champignon parasite et se nécrosent, rendant impropre la parcelle pour cette plante mais n’empêchant pas l’alternance pour d’autres cultures.

Peu calorique et très vitaminée

Ce légume du potager, cousin de l’oignon, originaire du Moyen-Orient et du pourtour méditerranéen, connu dès l’Antiquité puis oublié et revenu en grâce à la table de Louis XIV, fait donc aujourd’hui encore les beaux jours du terroir de Mazan et de Mormoiron notamment. Peu calorique et très vitaminée, l’asperge doit être choisie bien ferme et avec une tête cassante, signes de fraîcheur et de qualité. Elle reste un mets de choix dans l’assiette provençale…

Parole de…

Parole de…

Mickael Vayson, producteur d’asperges à Mazan

« L’asperge exige de l’expérience »

Je me souviens qu’à l’âge de 14 ans, après l’école ou pendant les vacances de Pâques, j’aidais mes parents et grands-parents au bottelage, la mise en bottes aussitôt les asperges ramassées. On s’installait au bout du champ, parfois à l’abri d’un cabanon : toute la famille était mobilisée. Ensuite, durant l’été, on laisse repousser un abondant feuillage en forme de chevelure. Ces « cladodes » sont ensuite broyées sur place afin de constituer une sorte de paillage pour l’hiver. Les racines, que l’on appelle des « griffes », entrent en dormance … puis tout recommence au printemps !

Je suis l’héritier d’une tradition à la fois familiale et locale, mais si j’ai repris l’exploitation pour la développer, ce n’est pas simplement par atavisme. Les jeunes agriculteurs du pays du Ventoux travaillent avec passion. On croit en notre métier, mais il faut bien maîtriser son sujet, acquérir de l’expérience et garantir la qualité du produit pour s’épanouir dans l’agriculture aujourd’hui.

 

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mg_3383La Foire aux asperges de Mormoiron

L’événement célèbre depuis maintenant 27 ans, vers la mi-avril, la traditionnelle culture de l’asperge, présente depuis toujours dans les champs sablonneux du Pays du Ventoux. La foire rassemble une centaine de stands (produits du terroir, exposition des artisans d’art…), propose des ateliers de dégustation et des concours de cuisine ou fait encore défiler une remarquable collection de 60 tracteurs anciens. Mormoiron attire ainsi plus de 3.000 visiteurs dans une belle ambiance !

La recette du chef

Recette-aspergeMéli-mélo d’asperges

Ingrédients pour quatre personnes :
24 pointes de belles asperges tranchées à moitié de leur longueur
125 g de roquette, 80 g de jambon cru en chiffonnade, 80 g de pignons de pin grillés, 20 g de graines germées de poireaux, 50 g de noix de cajou, 20 cl d’huile vierge fruitée, 50 g de copeaux de parmesan Reggiano au couteau économe

Cuisson des asperges :
Plonger les pointes dans une casserole d’eau bouillante.Les cuire 5 minutes et les égoutter.
Les rafraîchir dans un récipient contenant des glaçons (afin qu’elles conservent leur belle couleur).
Préparation du pesto :
Mixer finement au blender une grosse poigne de roquette, les noix de cajou, l’huile d’olive et 30 g de parmesan râpé.Réserver.
Montage de l’assiette :
Donner 4 coups de pinceau trempé dans le pesto à chaque angle de l’assiette. Au centre, placer la roquette en dôme. Dresser harmonieusement les 6 pointes d’asperge par dessus. Ponctuer de chiffonnade de jambon cru. Éparpiller quelques copeaux de parmesan. Parsemer de pignons de pin grillés. Terminer par les graines germées de poireaux.
Détendre un peu de pesto avec de l’huile d’olive et assaisonner votre salade.

Chef créatrice : Pascale MENA- MALTAGLIATI – Restaurant L’Autre Cantine à CARPENTRAS (2014)

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