L’huile d’olive

La renaissance d’un arbre-symbole

oliveSymbole de paix et de longévité, l’olivier est plus vieux que l’homme. C’est un arbre de sagesse, sa présence est inscrite dans tous les mythes fondateurs de Méditerranée. Arrivé à Marseille avec les Grecs et les Romains, il s’est enraciné en Provence. Au début du XIXème siècle, l’arbre magique règne sur les campagnes vauclusiennes où l’on compte jusqu’à 200 moulins à huile. Les gels successifs, et surtout le redoutable hiver 1956, vont décimer des milliers d’arbres. L’oléiculture entre alors en sommeil, même si certains secteurs plus abrités ont échappé à l’hécatombe. La cuisine moderne oublie un temps les saveurs si particulières de l’huile d’olive. L’histoire, finalement, donne raison à Sophocle, admirateur et chantre de « l’arbre éternel qui renaît de lui-même ». A partir de 1995, avec l’aide d’un plan de relance européen, on plante à nouveau des oliviers ou bien l’on restaure de vieilles parcelles, notamment sur les coteaux du Ventoux, pour en récolter l’olive et la transformer en huile, à l’heure où l’on redécouvre les vertus millénaires associées du régime crétois.

Le temps des olivades

L’art de l’oléiculteur c’est d’abord la taille et l’entretien des oliveraies. Puis vient le temps des olivades. Entre Ventoux et Comtat, on récolte surtout l’Aglandau, une olive allongée, pulpeuse et ferme qui donne une huile fruitée et ardente, au goût d’artichaut ou d’amande. Moins souvent la Tanche, fruit plus rond et charnu, excellente olive de table. Dès novembre, et pendant un mois à peu près, le sol des oliveraies se couvre de filets de couleur, et l’on s’emploie à gauler ou peigner les arbres pour en recueillir les fruits qui seront portés au moulin, sans trop attendre pour ne pas altérer la qualité de l’huile.

 

Si le matériel a évolué, la méthode d’extraction de l’huile n’a quasiment pas changé depuis 6 000 ans. Les olives, lavées, sont broyées avec leur noyau, puis malaxées. On obtient une pâte onctueuse que l’on étale sur des scourtins circulaires de coco tressé avant de presser, parfois encore à la meule de pierre. C’est la pression à froid. Dans les moulins « en continu », la pâte n’est plus pressée mais centrifugée. On recueille dans chaque cas un mélange d’huile et d’eau qu’il faut décanter ou centrifuger pour isoler une huile aux saveurs plus ou moins prononcées. On distingue le « fruité vert », le « fruité mûr » et le « fruité noir ».

Une passion qui gagne du terrain

Le Ventoux à lui seul concentre à peu près un tiers du verger vauclusien, dont la production moyenne est de 340 tonnes d’huile d’olive par an, soit 7% de la production française. La production bénéficie depuis 2007 de l’AOC « Huile d’olive de Provence ». Les oliviers ont regagné peu à peu du terrain, leur nombre a dépassé aujourd’hui le cap des 300 000. Le groupement des oléiculteurs de Vaucluse regroupe 430 producteurs. A côté des professionnels, nombre de particuliers se sont pris de passion pour l’olivier et apportent leur récolte aux moulins. Environ 60% de l’huile produite est reprise par les apporteurs pour la consommation familiale ou la vente de proximité.

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La Provence ne serait pas vraiment elle-même sans le panache vert argent des branches d’oliviers…

La Provence ne serait pas vraiment elle-même sans le panache vert argent des branches d’oliviers et la présence émouvante de quelques vétérans au tronc noueux ayant survécu aux grands gels. C’est d’abord par attachement à sa belle présence dans le paysage que les gens du Ventoux ont redonné vie à cet arbre immémorial. La renaissance de l’olivier a incité à restaurer les terrasses de culture en pierre sèche, qui sont autant de chefs d’œuvre paysagers issus du savoir-faire rural. Le promeneur y trouve son bonheur, fertile en perspectives de développement touristique.

Les moulins aussi cristallisent la curiosité, à la faveur de l’intérêt retrouvé pour les vertus de l’huile d’olive. On y déguste les différentes cuvées d’huile d’olive avec la même attention sourcilleuse que pour les grands crus viticoles. La profession prolonge cet atout en ménageant des sites oléicoles à découvrir et en incitant les visiteurs à se balader, itinéraires à l’appui, sur le chemin des oliviers.

Parole de…

Parole de…

Bruno Theurlacher à Mazan

« Je ne suis pas né paysan.

Mon premier métier c’est le bâtiment, mais tout petit déjà je faisais des essais de culture dans le jardin de mes parents. Ca m’a toujours tenté. Quand j’ai acheté ici, il y avait dix hectares de vignes à l’abandon. J’ai décidé de m’intéresser aux oliviers. C’était un arbre un peu délaissé, on le mettait là où rien d’autre ne poussait. J’en ai planté 2400. On me disait : tu es fou !

L’olivier, c’est un arbre sauvage. Il ne se laisse pas attacher. Il fait un peu ce qu’il veut. Et il n’y en a pas deux pareils. J’ai tout appris, je me suis formé. C’est très intéressant. D’autant que l’olivier est assez imprévisible. Aujourd’hui encore, on n’est pas sûr de comprendre comment il fonctionne. Par exemple, on ne sait pas vraiment comment les insectes s’attaquent à lui. Ni comment ça pollinise. On dit qu’il faut un temps sec et du vent lors de la floraison pour transporter les pollens. Or il y a deux ans on a eu un temps pourri, et ça a été la plus grande production depuis le gel de 56 !

Percer les mystères de l’olivier

On fait des expériences. La profession tente de mieux percer les mystères de l’olivier, et je me porte volontaire. Je fais pousser de la moutarde pour vérifier si elle a, comme on le dit, des effets contre un champignon nuisible aux arbres. Je suis en conversion bio. Or, le problème du bio, c’est la mouche qui pond dans le fruit, ça laisse entrer l’eau, et ça abîme l’huile présente dans l’olive. Des solutions alternatives aux traitements chimiques sont mises au point, on fait des essais avec de l’argile pulvérisée sur les arbres, on teste les résultats.

 

Je m’intéresse aussi au sol, c’est ce qui permet à l’arbre de vivre. Je me suis mis dans l’herbe avec mon appareil photo et mon encyclopédie, et j’ai vu qu’il y avait du monde là-dedans. Les insectes, ça aère le sol, ça fertilise. Du coup, je laisse une bande d’herbe au milieu des rangées. Même si elles sont sèches, ça fait refuge. Et quand j’arrive pour la couper un peu, c’est tout juste si je ne klaxonne pas ! »

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Le Groupement des Oléiculteurs de Vaucluse

Le Groupement des Oléiculteurs de Vaucluse s’est constitué en 1995 et regroupe plus de 400 producteurs (agriculteurs ou pluriactifs) mais aussi 11 moulins à huile. Il assure un appui technique qui consiste à proposer des formations, des démonstrations. Le groupement est porteur de deux actions de communication grand public :

– La Fête de l’Olivier et des Moulins à Huile de Vaucluse, en octobre

– La Journée Portes Ouvertes des Moulins, en décembre

 

www.civampaca.org

04 90 78 21 61   

La recette du chef

Terrine de tomates aux anchois, oignons confits, avocat et brousse de brebis

huile-dolive-recettepour 4 personnes : 4 belles tomates bien mûres, 1 avocat,100 g d’oignons confits, filets d’anchois, 100 g de brousse de brebis, pluche de cerfeuil, 1 cl d’huile d’olive, 1 cl de vinaigre balsamique, sel, poivre.

• Cuire les oignons émincés avec de l’huile d’olive, quelques gousses d’ail écrasées et une pincée de thym du Ventoux. Les laisser cuire assez longtemps pour que les oignons soient bien confits, ajouter sur la fin deux pincées de sucre, et laisser refroidir. Ensuite ébouillanter les tomates pour enlever la peau, puis les épépiner en les coupant en 2. Ecraser les 2 moitiés de tomate avec la paume de la main et les couper avec un emporte-pièce. Prendre la chair d’un avocat bien mûr et la mixer pour en faire une purée, ajouter sel, poivre et une cuillère d’huile d’olive.

• Montage de la terrine : prendre un emporte-pièce, mettre au fond un rond de tomate, puis les filets d’anchois tout autour, une cuillère à soupe des oignons confits, une cuillère de brousse de brebis, une de crème d’avocat et recouvrir de la deuxième rondelle de tomate. Presser l’ensemble, toujours avec la paume de la main. Retirer l’emporte-pièce, la terrine portion est prête. Disposer la terrine sur une assiette, ajouter quelques herbes fraîches, une lichette d’huile d’olive, du vinaigre balsamique autour, du sel et du poivre.

Chef créateur : Michel PHILIBERT – Maître cuisinier de France, disciple d’Escoffier – Restaurant Le Gajulea à LE BARROUX (2014)